Impressions de voyage au Pamir, le corridor de WAKHAN du 12 au 24 juin 2019


C’était à l’automne 2017 à Tashkent avec Alain (ami et collègue) nous étions en inspection hôtelière pour la nouvelle saison, quand j’ai reçu un appel téléphonique, un numéro inconnu s’affiche. J’ai saisi que c’était un appel venant de France. Je réponds. Une voix masculine se présente “ je suis Philippe, ami de Pierre, nous sommes 6 amis et voulons faire un voyage en juin 2018 si vous êtes disponible pour nous guider, nos amis Pierre et Madeleine seront des nôtres également ?”...

Tout commence là, ledit Philippe m’a présenté́ ses souhaits de réaliser un voyage en Asie centrale, en précisant que lui et ses amis ont déjà̀ parcouru l’Ouzbékistan, ce fut pour eux un voyage fascinant et inoubliable. Le but de sa demande téléphonique est de continuer l’aventure dans cette zone géographique, sur les découvertes de l’ancienne route de la Soie.

Pour ce projet je devais les guider à partir du sud du Kazakhstan et du Kirghizistan... leur voyage se finissant à Kashgar en Chine. Hélas pour moi cette dernière partie je n’ai pu les accompagner à cause du visa chinois que je n’ai pu obtenir à temps. Je les ai alors confié à un collègue Ouighour francophone à la frontière kirgizo-chinoise à Torugart.

Mais ce n’est pas les détails de ce voyage de 2018 que je veux vous faire partager, mais du voyage qui vient d’être effectué en juin 2019 dans les Pamir (Tadjikistan). Un voyage hors du commun, voire rare et exclusif, que j’ai effectué́ pour ces mêmes 6 amis, Philippe & Christine, Emmanuel & Marie Pia et Pierre & Madeleine.

Fin de l’année 2018, je reçois des nouvelles de Philippe me disant « ça y est nous sommes prêts de partir pour le Pamir, que nous proposes- tu ? ». Je lui réponds spontanément « faire le Pamir sans faire le corridor de Wakhan (gorges séparant le Tadjikistan de l’Afghanistan) serait peut-être un voyage raté ». Je travaille aussitôt l’itinéraire, les étapes et je lui fais une proposition. Proposition acceptée sans trop de discussion tant qu’il correspond à leur attente ! Merci Philippe d’avoir pris aussi vite cette décision !!

C’est un itinéraire qui démarre d’Osh (Kirghizistan), qui nous permettrait de voir le pic Lénine coté du Kirghizistan, et faire aussi une étape à Saritash, village kirghiz situé à 3000 m d’altitude, une étape importante d’approvisionnement soit pour aller en Chine à l’Est, soit au Tadjikistan au Sud.

https://www.mapsdirections.info/fr/tracez-itineraire-sur-google-maps/viewMap.php?route=202341

A la veille de leur arrivée, je prends le train de nuit de Samarkand à Tashkent, puis la correspondance à Andijan. De là en taxi j’arrive à la douane “Dustlik”, le passage de la frontière risque d’être long pour les formalités comme avant où y a-t-il des améliorations ? Non, agréable surprise ! En 15 minutes j’ai passé́ les deux douanes ouzbek et kirghiz. Record battu)) incroyable ce changement, quelle évolution ! Pourtant il y avait du monde, les douaniers sont sympas, le contrôle du passeport se fait rapidement et pas de bouchon... Je n’en reviens pas.

Bien heureux de ce passage rapide, je vérifie ma messagerie pendant que j’ai encore de la connexion avant de nous “perdre” dans les montagnes du Pamir où le réseau se fera certainement désirer.

Je découvre le message de Philippe “nous partons bien de Paris vers Osh, mais j’ai un souci, pour moi et Christine, nous n’avons pas le visa Tadjik”. Je pense sur un premier coup à “une mauvaise blague”, mais sentant qu’il y a quand même un sérieux problème dans ce message, je lui réponds sur le champ, “c’est un problème majeur !”.

L’avion est à l’heure, les retrouvailles furent heureuses, mais la question du visa Tadjik pas encore reçu par internet, nous angoisse tout de même. On refait la demande du visa Tadjik sur internet, car les premières demandes faites par Philippe ne sont pas bonnes... Une fois faite, on avait qu’à attendre ! Combien de jours ? Dieu seul le sait ! Mais demain nous devons traverser les frontières. Je décide tout de même de les amener à la douane sans visa avec espoir peut être que ce problème pourrait se résoudre sur place... Hélas non ! Les douaniers Tadjik très gentils d’ailleurs, nous expliquent bien la cause, faire le visa ici ce n’est pas dans leur compétence, et ils sont bien désolés ... Christine les larmes dans les yeux, Philippe bien sage, conscient des erreurs commises, rentrent au village Sarytag où il verront ce qu’ils vont faire pour la suite avec Yorkinoy collaboratrice de Shéhérazade Voyages qui finit par leur organiser un voyage d’une petite semaine dans la vallée de Ferghana. Et Philippe et Christine reçevront le visa Tadjik 6 jours plus tard. Ils nous rejoindront à Doushanbé́ (capitale du Tadjikistan) en passant par le nord du Tadjikistan par la ville de Khodjent et Istaravshan ( Ura tépé).

Ils n’ont pas pu faire le Pamir au Tadjikistan, mais cela sera une autre fois...

Le Pamir est un massif de hautes montagnes centré sur l'Est du Tadjikistan avec des prolongements en Afghanistan, en République populaire de Chine et au Kirghizistan. Situé à la jonction entre plusieurs systèmes orographiques d'Asie centrale et du Tibet. Il possède trois sommets principaux de plus de 7 000 mètres dont le pic Ismail Samani, généralement considéré́ comme son point culminant à 7 495 mètres d'altitude, ce qui a valu au massif le qualificatif de « toit du monde ». Son nom s'applique aussi bien à un certain type de vallée glaciaire plus fertile que les montagnes et les plateaux qui les entourent. Ces derniers sont généralement soumis à des conditions climatiques extrêmes, avec des précipitations très faibles et des écarts de températures importants, en particulier dans la moitié orientale désertique du massif. Toutefois, le Pamir est l'une des régions qui abrite le plus de glaciers en dehors des pôles, dont le glacier Fedtchenko avec ses 77 kilomètres de long. Ceci lui permet d'être parcouru par un grand nombre de rivières appartenant aux bassins de l'Amou-Daria à l'ouest et du Tarim à l'est, et de contenir des centaines de lacs.

Nous avons retrouvé́ nos chauffeurs tadjiks Sukhrob, qui sera surnommé Monsieur «On y va» par la suite, et Abduvakhob qui a été́ tout de suite “baptisé” par un Monsieur “Moustache” par nos amis français.


Mr Moustache Monsieur "On y va!"

Nous nous dirigeons vers le lac Karakul (de 3923m). En passant le col Akbaital à 4655m, c’est le col le plus haut de notre parcours. Nous nous arrêtons pour le déjeuner dans une famille kirghiz près du lac. Même si nous avons traversé́ les frontières du Tadjikistan, l’ethnie qui habite ces régions-là̀ sont des nomades d’origine kirghiz. Ils élèvent des yaks principalement à cette altitude.

Après un bon déjeuner bien chaud dans cette famille accueillante, nous prenons notre route pour le col Akbaytal. Il ne fait pas très chaud, nous nous couvrons bien, pour des photos on ne s’arrête pas trop longtemps...Un vent glacial nous pince le visage !

Notre première nuit sur le sol Tadjik se fait dans le petit village de Mourghab. Village désertique ou il n’y a pas de végétations. Cela me fait tout bizarre, mais c’est normal nous sommes en altitude où les plantes ici sont très rares. On se demande de quoi ces gens là peuvent vivre, pourtant ils n’ont pas l’air malheureux ! Il faut être né ici pour y vivre !

Le lendemain nous prenons la route via la vallée d’Alitchur pour le village Langar. Nous passons par le col de Khargoush. Avec une vue sur des paysages splendides parsemés de yourtes et de troupeaux de yacks. C’est ce jour-là également que nous commençons à longer la frontière Afghane, autrement dit le fameux corridor de Wakhan. Nous avons été́ contrôlé́ pour nos visas deux fois, une première fois avant de quitter le village Murghab, une deuxième fois avant d’entrer dans le corridor par des militaires. On pense à nos deux amis laissés au Fergana, heureusement que les douaniers à Kyzil Art ne les ont pas fait passer sans visa... ouf.

En quittant la route principale, nous empruntons une piste...les paysages changent, ici certainement les géologues feraient un régal, tellement la géologie du Pamir est intéressante et variée. Nous longeons le torrent dit Pamir... et l’autre coté c’est l’Afghanistan tout près. Pas de limites ou barbelés artificielles, juste un torrent qui sépare l’Afghanistan du Tadjikistan. Nous apercevons que de l’autre coté il y a un sentier parallèle à notre piste ... Nous nous arrêtons pour une pause et là nous voyons passer une caravane composée de chevaux chargés de marchandises ... Une dizaine de chevaux. Des femmes afghanes habillées en rouge, tenue traditionnelle et des hommes à pied dirigeant la caravane...On se croirait revenu aux siècles passés accompagnant ces fameuses caravanes de la route de la Soie, dans ce paysage fastueux, on a beau zoomer avec nos appareils photos, mais la distance est un peu éloignée par rapport à la puissance de nos zooms.. Une centaine de mètres peut être, malgré́ cela des clichés multiples sont faits...les afghans nous ont fait des signes de salutations, nous aussi.. Un échange sans mots.. C’était un moment émouvant et magique..

Nous arrivons au village Langar, nous nous installons chez Mohamed, notre hôte pamiri ismaélien. C’est notre première approche avec la population ismaélienne. Sa maison fait face à la jonction du Pamir et l’Hindikoush, avec des cimes enneigées. Lieu exceptionnel, L’Afghanistan juste en face, mais imaginer que derrière l’Hindikoush c’est le Pakistan, j’ai l’impression d’être allé́ bien loin dans un monde inconnu voire irréel... pourtant j’ai les pieds sur le sol Tadjik.

J’interroge Mohamed, notre hôte, es-tu déjà̀ passé de l’autre côté de cette rivière ? Il fait oui de la tête, il y a longtemps juste après l’Indépendance lorsqu’il y a eu la guerre civile ici.

  • Qu’as-tu fait là-bas ?
  • On cherchait de quoi se nourrir, de commercer car les routes et chemins venant de Doushanbé étaient impraticables, plus aucune voie de communication, nous étions coupés du Monde à cause de la guerre civile. Les afghans de l’autre coté, sont de la même ethnie que nous, ce sont des pamiris ismaeliens aussi, mais...
  • Mais quoi ?
  • Comme nous n’avions pas pu communiqué pendant l’époque soviétique, il est alors apparu une grande différence de mentalité́...

Je comprends ce qu’il veut dire. Une caravane comme au moyen âge déjà̀ rencontrée sur le chemin d’hier, m’avait déjà̀ expliqué ces choses.

- Mohamed, tu ne ressembles pas à un Tadjik ? Je dirai plutôt à un afghan de faciès ? Avec un grand sourire, il me répond, : « je suis pamiri dans l’âme, mais je suis Tadjik tout de même)) Et nous sommes des ismaéliens, rajoute-il avec fierté́. Nous avons eu la visite de l’Aga Khan. Il nous soutient financièrement. Sa fille aussi qui nous a rendu visite dans notre village, il y a plusieurs villages ismaéliens dans cette region, mais c’est notre village qui a eu l’honneur de les recevoir...

Plus tard dans la salle à manger chez Mohamed, je remarque le portrait de l’Aga Khan, le guide suprême des ismaéliens.

On connait très mal l'origine des Ismaéliens, parfois associée à des images un peu troubles.

“Les Ismaéliens appartiennent à l'une des diverses branches du chiisme, l'une des trois variantes de l'Islam (sunnisme, chiisme et kharijisme). Ils appartiennent ensuite à un rameau mineur du chiisme (septimain), moins connu que le chiisme duodécimain présent en Iran et en Azerbaïdjan, et sont de rite nizarite (de l'Imam réformateur Nizar au XIe siècle).

Dans leur berceau d'origine, le Badakhchan, ils ont très tôt été imprégnés d'autres éléments préislamiques, comme le platonicisme grec (prédominance de la pensée individuelle fondée sur la raison et la critique), le zoroastrisme (adoration notamment du feu) ou encore le nestorianisme, sans compter des influences chamaniques liées à la nature. Par tradition, les femmes ont dans l'ismaélisme la même place que les hommes. Les mosquées, également qualifiées de "maisons de sagesse", sont de taille modeste et ouvertes, en dehors des prières, aux débats philosophiques. Elles servent même souvent de mairies. Les décisions pour la gestion des villages y sont prises, avec la participation des femmes”. Les Ismaéliens se reconnaissent en un leader spirituel commun, l'Agha-Khan, personnalité́ à la fois politique et religieuse. Les Ismaéliens peuplent en grande partie une zone nommée le Badakhchan et comprenant la majeure partie de l'ouest du versant himalayen, du K2 au Pakistan au Pamir kirghiz, en passant par l'Hindou-Kouch. Autrefois regroupés en un même royaume himalayen, ils ne disposent plus aujourd'hui d'État, depuis que le grand-père de l'Agha-Khan actuel a été́ chassé du Badakhchan tadjik par l'Armée Rouge en 1921-1922. Le Haut-Badakhchan tadjik a aujourd'hui le statut de Région Autonome et se situe à l'est du Tadjikistan. Ce statut date de 1929, où, pour stabiliser le sud de l'URSS, Staline avait alors décidé́ de créer un District Autonome établi sur une base religieuse. Cela constituait bien entendu une exception au sein de l'URSS athée et n'a pas empêché́ par la suite Staline de réprimer les Ismaéliens les plus croyants, comme de ne pas reconnaitre l'Agha-Khan, comme personnalité́ morale (d'où̀ le maintien de ce dernier en exil à Londres). (extrait d’artcile du Novastan)

Au 5ième jour de notre périple, nous continuons la piste pour le village Yamg, où l’on visite le musée et le calendrier solaire réalisé par le Soufi Muborak Kadam. Une visite très intéressante guidée par le conservateur du musée, nous informant qu’il est l’arrière petit fils de Muborak Kadam. Le musée, une maison construite dans le plus pur style architectural pamiri. Le concept de la maison pamiri me fait penser à la forme du palais d’Afrossiob du VII siecle, sa salle centrale ressemble fortement à la salle de réception du roi Varkhuman de Samarkand. Une salle carrée, sur les bords une estrade enlevée, « supa », le centre de la salle fait un creux avec des estrades... les invités sont installés sur le « supa ».Une ouverture au plafond éclaire la salle de la lumière du jour.

Notre guide excelle non seulement dans l’art de la narration, mais également en musique, il nous interprète, avec d’anciens instruments à corde du musée, quelques partitions traditionnelles pamiri. Une étrange sonorité́ très mélodieuse, nous emporte dans un autre univers.. Un moment fort...

Nous quittons notre narrateur avec un peu de regret, sachant qu’il pouvait encore nous conter d’autres merveilleuses histoires, mais nous avons un trajet à réaliser ce jour, je m’apprête à « bousculer » un peu les amis, mais notre chauffeur Monsieur « On y va » « économise » mon énergie, comme à son habitude, il dit On y va !)) Et c’est bien clair pour tout le monde ! Merci Monsieur « On y Va ! »

L’étape suivante est la visite des sources chaudes de Bibi Fatima et Zakhro. Là, nous allons prendre un bain dans ces sources chaudes, et nous y ferons de belles rencontres. Tout d’abord, dans ce bâtiment, il y a une salle pour les femmes et une autre pour les hommes. C’est un genre de piscine couverte et il est interdit d’y descendre en maillot du bain... tout le monde en tenue d’Adam. Cela tombe bien j’avais oublié́ mon maillot de bain))

Une dizaine d’hommes y sont présents, comme il y avait des anglo-saxons qui nous avaient précédés, je pensais qu’il n’y avait que des étrangers. Non, la majorité́ sont des pamiris, comme ils sont blancs aux yeux bleus, je les avait confondus avec les anglais, c’est à langage que je les ai reconnus .. Eh oui, comme ils n’avaient pas de tenues traditionnelles sur eux j’avais du mal.. lol

Ils sont curieux, ils engagent tout de suite la conversation, voulant savoir d’où venons et qui nous sommes. Le nom de Samarkand leur fait dire avec admiration « Ah tu es de la bas !! » Ils sont sympas ces tadjiks !

Pierre me demande s’il peut faire une photo du lieu, je demeure un peu perplexe et confus, Et dis, « je ne suis pas sûr qu’ils vont apprécier de se faire prendre en photo en tenue d’Adam ?! »

La température de source est de 52

Elle est d’issue de geyser, enrichie de rhodon , améliorant les résultats de la cure, mais il ne faut pas y rester trop longtemps, nos compagnons tadjiks sortent du bain, on y reste seuls, Emmanuel, Pierre et moi. Pierre profite de faire des photos finalement, certaines compromettantes à mon sujet. Il veut me les vendre chères ! ))

Cette détente était aussi un moment très agréable. On continue notre trajet après le déjeuner et sur la route nous visitons les vestiges de la forteresse de Yamtchun, construite sur le sommet d’une montagne permettant de dominer toute la vallée Panj.

Nous arrivons à Ishkashim après 3 h de route. Une petite ville où il y a quelques années avait encore lieu le marché afghan. Hélas, il n’y est plus. Le gouvernement tadjik a fermé ce marché, certainement pour éviter le trafic de drogue. Nous nous baladons vers la rivière Panj. En chemin, nous croisons un monsieur, qui me dit en tadjik, « ça y est vous êtes ici ? » je dis oui, mais je ne comprends pas tout à fait bien sa remarque, son visage je l’ai déjà̀ vu quelque part, mais où ? je ne m’en souviens pas ! Il me le rappelle « on était ensemble aux sources chaudes ce matin ». Mais bien sûr !!, quelle mémoire courte, mais il est vrai que je l’avais vu dans l’eau !

On se met à refaire le monde avec lui, nos amis lui posent aussi des questions, je traduis... et il finit par nous inviter au bistrot du coin pour boire de la vodka. Il est vrai que ce n’est pas bien de refuser, mais on était attendu pour le diner dans notre maison d’hôtes. Il insiste, mais je réussis à lui passer nos excuses. Encore une fois pour l’hospitalité́ tadjik, chapeau bas !

6e jour, destination Khorog

Nous partons pour un lieu dit Garm Tchasma (Source chaude), endroit où l’on peut réaliser des cures. Un grand bâtiment de station thermale utilisé principalement par les locaux. Impressionnant le geyser, mais personnellement je préfère la source d’hier.

On continue notre route pour Khorog (2000 m), capitale de la région autonome du Haut-Badakhchan. Située de part et d’autre de la rivière Gunt, elle offre une vue imprenable sur les nombreux pics majestueux qui l’entourent. La route longe toujours la frontière afghane ; peu à peu, on quitte les vertes plaines pour une superbe région montagneuse d’où se dégage une saisissante sensation de calme et de sérénité́.

A l’arrivée, nous avons visité́ le jardin botanique. Le Jardin Botanique du Pamir est le deuxième jardin le plus haut au monde après celui du Népal. Il est situé́ à une altitude de 2250 mètres sur les hauts de la ville de Khorog, capitale du Haut-Badakhchan du Tadjikistan. Le territoire du jardin, qui se trouve à la confluence de deux grandes rivières de montagnes Gunt et Shahdara, est de 624 hectares. Le jardin botanique a été́ aménagé́ en 1940. L'un de ses fondateurs était le professeur Anatoli Gursky, qui, avec un groupe de scientifiques, ont créé́ ici un laboratoire naturel unique pour l'étude de la vie végétale à haute altitude. Diverses plantes, arbustes, arbres du monde entier y ont été́ apportés. À ce jour, on y trouve plus de quatre mille espèces de plantes.

Puis nous avons visité́ le marché́ de la ville, le bazar, on y fait quelques petits achats. Madeleine se fait le bonheur d’acheter une robe en tissus ouzbek)), la vendeuse lui chante du Joe Dassin. Cela tombe bien, car Madeleine est meneuse de notre « chorale ». Voilà un échange non seulement commerciale mais également culturelle qui est fait ! )))

Pour finir la journée j’avais prévu d’aller visiter le centre culturel et cultuel des Ismaéliens. Hélas on arrive à l’heure de fermeture, je n’avais pas cette information, mais ce n’est pas grave, pas de galère, je leur dis qu’on reviendra demain matin tôt !

On revient à notre hôtel Serena Inn, tant désiré́ par Philippe. D’ailleurs, on n’a toujours pas de nouvelles de leur visa tadjik, cela me parait un peu gonflé.

L’hôtel est très charmant, possédant seulement 6 chambres, au bord de la rivière, avec de très beau jardin bien fleuri en cette époque. Je profite de mon temps libre pour faire quelques clichés. Finalement c’était bien de venir un peu en avance dans cet hôtel, car nous avons bien profité du confort, après quelques nuits dans des lodges rustiques.

A l’aube de notre 7ième jour de voyage, comme prévu, on retourne au centre des ismaéliens. Nous avions un guide Anglophone, un jeune homme qui parle davantage de la quantité de milliers de briques utilisées pour la construction du bâtiment plutôt que de la communauté́ elle-même ! Il est bénévole apparemment comme tous ceux et celles qui travaillent ici.

Le bâtiment est ultra moderne, très beau, l’architecte est un ismalien du Canada. Et il a su bien allier le style traditionnel avec le modernisme, le résultat est incroyablement beau ! Ce qui est le plus impressionnant dans cette ville perdue au milieu des montagnes, ou autrement dit au milieu de nulle part, est ce modernisme paraissant irréel !

Après cette visite nous partons pour Kalai Khumb. A propos j’ai failli oublier de vous dire que nous croisons tous les jours soit 2-3 motards étrangers soit 2-3 cyclistes depuis que nous sommes partis du Kirghizistan. Je dis à Marie Pia, il y a quand même beaucoup de touristes dans ces coins, elle me fait de grands yeux, en disant “Sherzod, tu blagues ou quoi beaucoup de touristes ? il n’y a que nous dans ces régions là, aucun autre voyageur !” Effectivement le mot “ voyageur”, c’est bien le mot qui convient au contexte, car le tourisme de masse n’est pas pour ici.

Nous passons la nuit au village Kalai Khum, dans une maison d’hôtes, c’est là où nous avons vu quelques routards, motards étrangers. Était-ce les mêmes que nous avions croisé sur le chemin, c’est fort possible.

J’ai enfin les nouvelles de visa pour Philipe et Christine, nous en sommes tout heureux, malgré́ qu’ils aient raté une semaine de voyage dans le Pamir, ils vont pouvoir nous rejoindre à Doushanbé́, la capitale tadjike. Ils rentrent donc au Tadjikistan depuis la vallée de Ferghana en passant par Khodjent et Istarafshan.

Huitième jour de notre parcours, nous partons pour un long trajet sur une route tantôt bonne parfois mauvaise. Les paysages varient, « notre cher sentier afghan » que nous longions parallèlement du coté tadjik devient également une piste, sur laquelle nous voyons de temps en temps une voiture ou un camion. Les villages afghans sont beaux, parfois nos regards croisent ceux des enfants rentrant de l’école, filles et garçons. Alors qu’au Tadjikistan c’est déjà̀ les vacances d’été́ pour les petits, et pour les grands ce sont les examens de fin d’année.

Ce jour nous prenons la route en direction de Doushanbé, en passant par la ville de Koulob où nous déjeunons dans un restaurant d’une spécialité́ “ shakarob”, une soupe froide au fromage dans laquelle on trempe le pain tout frais.. C’est un régal.

Superbe visite ce jour, au musée et la forteresse de Khulbuk en compagnie du guide des lieux, qui est aussi un archéologue de mérite et un passionné. Il nous explique tout en détails l’histoire de la forteresse. Ce petit musée est fort bien équipé́, la maquette de la forteresse est impressionnante. Lors de cette visite, notre hôte, chef du musée nous surprend de la manière dont il s’accapare les objets fragiles du musée et nous les passe de main en main afin de nous photographier avec ces précieux trésors. La pauvre Madeleine passe en premier cette épreuve, elle tremble de peur afin de ne pas laisser tomber l’objet rare datant de plusieurs millénaires. Je la comprends !

Monsieur “On y va” s’impatiente, nous devons partir pour Doushanbé, et on a encore deux cents bornes à faire, et nos amis sont déjà̀ arrivés à Doushanbé́, nous y attendent impatiemment. Encore des surprises qui ne finissent pas de nous étonner, nos chauffeurs lavent obligatoirement leur voiture avant d’entrer à Doushanbé car des voitures sales dans la capitale risquent une amende d’environ 50 somoni, ce qui est une somme considérable, lorsque le salaire moyen est ici de 750 somoni dans le pays ( 70 euros).

On arrive vers la fin de la journée et les retrouvailles avec nos amis sont des moments heureux, et on arrose cela aussitôt avant d’aller au diner. La fête commence.

Après un bon dîner, nous faisons une balade nocturne sur la place centrale de la capitale Tadjik, en passant des beaux bâtiments présidentiels. La place Somoni est très joliment éclairéé et ou pavoise une énorme statue couronnée d’or... Philippe s’étonne de ces richesses, en me disant qu’il y a une chose qui ne va pas ! Le Tadjikistan qui est l’un des pays les plus pauvres au monde selon les statistiques internationaux, comment est-ce possible qu’on y construise de tels buildings, de magnifiques jardins, des statues en or... d’où vient tout cet argent ? La Paradoxe !

Nous assistons au tournage d’un clip de jeunes chanteurs Tadjik. Je comprends que ce sont des chants patriotiques... je préfère et de loin les chants des narrateurs pamiri rencontrés au village Yamg racontant l’épopée des anciens.

Le lendemain avant de quitter la capitale, nous visitons un autre musée d’archéologie, ou l’on peut voir l’énorme statue de Bouddha couchée retraçant l’histoire du bouddhisme qui eut son heure de gloire à une époque lointaine lors de son expansion dans cette région d’Asie Centrale.

En descendant à Doushanbé, nous avions fini notre parcours dans le Pamir, dans la vallée de Panj, désormais nous nous dirigeons vers le nord-ouest du pays, d’abord le lac Iskandarkoul où l’on passe deux nuits. Puis une autre halte à Artouch, dans l’ex camps des alpinistes, ensuite nous allons vers Pendjikent, ou nous passons les frontières tadjiko-ouzbek, et finir notre belle épopée à Samarkand.

Nous avons pu ainsi établir un nouveau circuit fantastique de trésors révélés pendant 12 jours, avec une diversité de paysages, de rencontres inopinées nous menant à l’hospitalité́ incroyable des tadjiks et des découvertes culturelles…, rien que du bonheur…..

Autour d’Iskandarkoul ainsi qu’au village de Sarytag, nous avons pu faire de belles randonnées, qui nous ont amenés à faire une rencontre inattendue dans le hameau des bergers. Nous voyant arriver de loin vers leur camp, des femmes bergères nous invitent à venir partager les offrandes qu’elles nous avaient préparées : yaourt, pain, chocolat, bonbons... tout ce qu’elles avaient en leur possession à manger ! Moi ouzbek, je suis habitué un peu à ce genre d’accueil, mais les amis français visiblement n’en revenaient pas. Le peuple Tadjik quel que soit le lieu, au Pamir ou dans les monts Fanskie ont le même sens de l’hospitalité́ une tradition nomade qui ne s’est jamais perdue.

Le jour suivant notre deuxième randonnée qui s’effectuait dans la vallée d’Artouch,vers le lac Tchoukrak, nous admirons la flore qui à cette période compose les abords du lac si bien fleuris de lupins se reflétant dans l’eau... Magnifique, je vous laisse bien évidemment regarder les photos...

- Emmanuel, alors tu te plais dans cet endroit ? Il me répond, “euh oui, c’est beau, je n’ai jamais vu des lupins aussi grands, mais ils sont aussi jolis qu’en France, dans les Alpes”. Rhooooo quel chauvin !!! Avec cette bonne humeur nous redescendons dans notre lodge, mais je suis déjà̀ à Samarkand dans l’esprit

Nous finissons le voyage à Samarkand ! Le lendemain tôt les amis prennent leur avion de l’aéroport de Samarkand vers Paris en passant par Moscou.

En conclusion, mon récit reste un point de vue personnel, chaque voyageur doit se rendre sur place pour avoir son propre ressenti. Ce voyage est dans la catégorie exclusive. Il ne sera réalisé que sur demande, à des dates précises. Je remonterai ce circuit en été 2020. Que tous ceux qui sont désireux de découvrir ces régions encore préservées me contactent et je vous informerai.

Le lien pour acceder le voyage: La route de la Soie dans le Pamir

Vos commentaires seront les bienvenus!

Reportage de Sherzod SAMANDAROV.