Samarcande


La région de Samarcande

La province de Samarkand est situé dans la partie centrale de l'Ouzbékistan, dans le bassin de la rivière Zarafshon, entre les chaines de montagnes Turkestan et Zarafshon.

La province se compose de 14 districts ruraux - Okdaryo, Bulunghur, Jomboy, Ishtikhon, Kattakurghon, Koshrabot, Narpay, Nurobod, Payarik, Pastdargom, Pakhtachi, Samarkand, Toilok, Urgut; 11 communes - Oktos, Bulunghur Jomboy, Juma, Ishtikhon, Kattakurghon, Nurobod, Payarik, Samarkand, Urgut, Chelak; ainsi que 12 de type de petites villes et 125 villages.

Ville de Samarkand est le centre administratif de la province (354 km de Tachkent, 364,3 mille personnes).

Agriculture: le coton, l'horticulture, la viticulture, la production de cocons, et la culture du tabac.

Industrie: machines, l'industrie alimentaire, les équipements électriques, les ascenseurs et les matériaux de construction, la couture, et de la porcelaine.

La partie nord de la province se compose de la chaine de montagne de Nurota, tandis que le sud est entouré par les montagnes de Zarafshon.

La province possède de riches gisements de marbre (Qoshrabot, Omonkuton et Moybulok), le calcaire, ainsi que le granit.

Le climat de la province est continental et sec. L'hiver est doux et modérément froide, alors que l'été est chaud et sec.

L'économie de la province repose sur l'agriculture bien établie et de l'industrie. L'industrie lourde, l'industrie minière, les machines, le retraitement de métaux, produits chimiques et la construction sont les activités principales de production. L'industrie légère est représenté par le la filature de coton, textile etc.

La ville est également célèbre pour ses produits de raisin, ainsi que de vin.

Industrie automobile est bien installee dans la region de Samarcande avec la fabrication des camions de marque MAN, de bus ISUZI.

Plus de 60 coentreprises, environ 2000 petites entreprises et 100 entreprises coopératives opèrent dans la province; "Shark Lift", "Somrad", "Yulduz", "Armaya", "Jahon commerce", "Garzay Mekhnat Samarkand" pour ne citer que quelques-uns.

La province Urgut se spécialise dans la culture du tabac de haute qualité. La province est célèbre pour ses jardins et les raisins de meilleur qualité en Ouzbékistan. La province produit 100 % de kyshmysh (une sorte de raisin sec) totale du pays.

L'élevage bovin et ovin est bien développée dans les contreforts nord et sud de la chaîne de montagnes. Pour améliorer la qualité du produit , l'Institut de recherche scientifique de l’Elevage Karakul a été établi.

La production de l'apiculture et l’elevage de vers à soie est également tient la place importante dans la région.

Les fermes collectives, des fermes coopératives et 7812 entreprises agricoles opèrent dans la province.

La province dispose d'un réseau bien développé de transport des autoroutes et des voies ferrées, de l'eau et de gazoducs, ainsi que des lignes électriques.

Presque toutes les grandes villes ont accès au réseau de chemin de fer. La ville de Samarkand est un point majeur sur ce réseau de chemin de fer.

La longueur totale du réseau de chemin de fer est de 277 km. La longueur des routes automobiles est de 8.000 km. Samarkand est relié par des routes aériennes avec un certain nombre de grandes villes à travers le pays.

Plus de 1000 écoles, collèges, lycées, des écoles de musique et de sport, une université, quatre instituts et un certain nombre de collèges opèrent dans la province.

Il y a 4 théâtres, 8 musées et plus de 800 bibliothèques.

Samarkand est le deuxième plus grand cité en Ouzbékistan après Tachkent, de l'importance industrielle et démographique. Il est une destination touristique préférée, situé sur la rive gauche de la rivière Zarafshon.

La ville est presque sur le centre géométrique du pays, au carrefour de réseaux routiers et aériens, un facteur très important pour le développement.

De 1924-1930 Samarkand était la capitale de l'Ouzbékistan. Il est l'une des villes les plus anciennes dans le monde et son architecture historique et des monuments sont aussi magnifiques que les pyramides égyptiennes.

Samarkand est aussi une grande ville universitaire. Il est une université ainsi que des instituts médicaux, agricoles, coopératives, d'architecture et de construction. L'Institut d'archéologie de l'Académie des sciences de la République est également situé dans la ville.

L'industrie de la ville est représentée par les machines et un ascenseur construction, du textile, de couture, de la chaussure et du meuble.

Kattakurgon est la deuxième plus grande ville de la province de Samarkand. Machines, produits alimentaires et de la production de pétrole est bien développé dans la ville.

Samarcande

Carte de Samarkand

Capitale de Timour (Tamerlan), Samarcande fut la principale ville de l'antique Sogdiane. Elle prospéra au carrefour des grandes routes commerciales venant de Chine, de Sibérie, de Perse et d'Occident, jusqu'au déferlement des hordes mongoles de Gengis Khan qui détruisirent la cité avant de la reconstruire sur les cendres des faubourgs. L'heure de gloire de Samarcande survint deux siècles plus tard, lorsque Tamerlan en fit la capitale de son empire. Les merveilleuses madrasas de la place du Réguistan (XV-XVIIe siècle) décorées de faïences éblouissantes, nous permettront de mieux cerner les influences multiples qui marquent l'évolution de l'architecture timouride. Après la célèbre mosquée de Bibi Khanum, c'est la gloire des Timourides que nous célébrerons devant le mausolée de Shakhi-Zinda. Près du mausolée de Roukhabad se dresse le Gour-Emir, tombeau du grand conquérant qui conserve les dépouilles de Tamerlan de ses fils et de ses petits-fils.

Histoire de Samarcande

Samarkand ou Samarqand - francisé en Samarcande -, est l’une des plus anciennes villes du monde, qui fêtait son 2 500e anniversaire en 1970. Au milieu des steppes, l’oasis, arrosée par le fleuve Zeravchan - "Dispensateur d’or", pour son agriculture, dont les eaux furent canalisées depuis l’antiquité, comme en témoigne le canal Dargom qui remonte à l’époque achéménide au Vie s. avant J.-C. -, perdue aux confins du désert du Kyzil Koum, Samarcande fleurira pour devenir la célèbre "perle du monde islamique" ou le "visage de la Terre"...

Elle voit son origine remonter à la nuit des temps, la recherche archéologique date les briques de la première enceinte au VIIIes. avant J.-C., comme Rome; son nom évoquerait le roi Samar ou au roi Afrasiab, fondateur mythique de Touran? -. La Sogdiane sera soumise par Cyrus l’Achéménide vers 540-530 et intégrée à l’empire Perse. Mais la 1ère mention écrite remonte à Alexandre-le-Grand qui enleva la satrapie achéménide et Maracanda, sa forte capitale, en 329 avant J.-C.. Après la mort d’Alexandre en 323 avant J.-C., l’un de ses généraux, Séleucos, initia la dynastie des Séleucides (312 à 64 avant J.-C.), monarchie qui dominera sur la partie orientale de l’empire gréco-bactrien, malgré l’arrivée des Parthes au milieu du IIIes. avant J.-C.,. L’héritage macédonien et la culture hellénistique prospérèrent sous les Séleucides et perdurèrent au fil des siècles dans l’iconographie et la science des fortifications. Elle sera pillée par les Huns blancs, puis absorbée par le khanat turc au VIes., jusqu’à l’arrivée des Arabes en 712 - après l’un des dernières campagnes de Qutaïaba, le gouverneur du Khorassan -, qui la détruisirent en partie et la repeuplèrent de colons, qui en firent une ville raffinée. Seul un édifice de la période prémongole subsiste, un ancien sanctuaire dédié à un génie des eaux, islamisé sous la figure de Qutham. Avant l’arrivée des Mongoles la ville deviendra un haut-lieu de la pensée, où par exemple enseigna Omar Khayyâm, le célèbre poète et savant persan (1038-1131), qui y rédigea pendant son séjour un important traité d’algèbre, comme l’évoque avec brio Amin Maalouf, dans son ouvrage: "Samarcande". Puis elle sera envahie par les hordes de Gengis Khan en 1220. Pendant un siècle, elle eut des souverains mongoles et non musulmans, très tolérants au niveau religieux, qui protégèrent même les chrétiens nestoriens, comme en témoigne l’oncle et le père de Marco Polo.

Peu à peu la ville renaîtra de ses cendres. Le pouvoir des khans commença à s’affaiblir au profit des féodaux, quand survint le prince turco-mongol Tamerlan, originaire de Shakhrisabz, qui en fit sa capitale en 1370 au début de son règne, elle le restera sous son fameux petit-fils, Ouloug Beg, scientifique éclairé. Ils firent à eux deux la renommée de la cité, où ils y attirèrent force artistes et qu’il transformèrent en pure merveille...

Au XVIes., sous l’occupation des tribus nomades ouzbèkes (1500), elle fut incorporée dans le khanat de Boukhara et perdra de son importance passée. Finalement cette étape majeure de la Route de la Soie et des grandes routes des caravanes venant de Chine, de Sibérie, de l’Inde, d’Afghanistan, du Caucase, d’Iran et d’Occident… sera occupée par les Russes à partir du 14 mai 1868. Plusieurs fois capitale d’anciens États, elle réunissait diverses religions: zoroastrisme, bouddhisme, christianisme et islam. La ville historique de Samarcande est classée, depuis 2001, sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, en tant que “carrefour et lieu de synthèse des cultures mondiales”.

La Place de Registan

La Place de Registan

À Samarcande, le XVIIe siècle a été marqué par la construction d’importants bâti¬ments. Sur le Registan, la grande place de la ville, de nouveaux édifices monu¬mentaux vinrent remplacer les bâtiments délabrés ou détruits de l’époque timuride ; ils ont donné à cette place son visage définitif, celui d’une « poche » ouverte sur toute sa largeur vers le sud. Sur le côté est, en face de la madrasa d’Ulugh Beg du XVe siècle demeurée intacte, on construisit selon le schéma du kosh (« visà-vis ») la puissante madrasa Chir-Dor (« aux lions ») Edifiée dans les années 1619-1635/1636, elle doit son nom aux fauves qui figurent sur les tympans du portail. Dans l’esprit du commanditaire, Yalangtush, le souverain de la ville, la nouvelle madrasa devait faire pendant à la célèbre madrasa d’Ulugh Beg qui lui faisait face. La façade principale est dominée par l’immense portail en saillie doté d’une grande niche en ogive, entourée de bandeaux de faïence torsadés.

Des mosaïques de faïence et des carreaux de céramique à motifs couvrent toutes les surfaces extérieures du bâtiment. Par rapport au puissant portail orné de représentations d’animaux réalisées en mosaïque de faïence, les ailes à deux étages de la façade principale présentent une apparence modeste ; elles sont flanquées de minarets d’angles, des tours régulières qui, sur le modèle exact d minarets de la madrasa d’Ulugh Beg qui lui fait face, possèdent une corniche de couronnes de stalactites et une grande ornementation géométrique continue de briques emaillées. Avec ses deux salles de part et d’autres du portail et les loggi de la cour qui forment deux étages d’arcades interrompues par quatre iwans d posés en croix, le bâtiment s’inspire du plan général de son vis-à-vis. Comme coutume, des coupoles extérieures décoratives posées sur des tambours surmonte les coupoles intérieures des salles et attirent les regards. Les dimensions de madrasa Chir-Dor sont impressionnantes, mais par rapport à son ornementation remarquablement colorée, celle d’Ulugh Beg exhale une harmonie presque cl; sique. Comme on l’observe si souvent dans l’histoire de l’architecture, la copie i pas su dépasser ni même égaler l’original. Les travaux de construction de la madrasa Tilla-Kari (« la Dorée ») qui ferr la place du côté nord ont duré de 1646 à 1660, et sont restés inachevés. Ce grai bâtiment associait les fonctions de madrasa et de mosquée du vendredi Samarcande, ce qui explique sa disposition peu commune.

La madrasa Tilla-Kari

La madrasa Tilla-Kari

Les travaux de construction de la madrasa Tilla-Kari (« la Dorée ») qui ferme la place du coté nord ont duré de 1646 à 1660, et sont restés inachevés. Ce grand bâtiment associait les fonctions de madrasa et de mosquée du vendredi de Samarcande, ce qui explique sa disposition peu commune. On remarquera ici l'absence des coupoles habituelles sur les salles de la mosquée et des salles de cours de pan et d'autre du portail, ainsi que celle de la haute coupole extérieure se dressant normalement au-dessus de la façade principale.

Tout le côté ouest de la cour est occupée par la mosquée municipale, dont le centre est formé d'une salle à coupole. Des niches sont aménagées dans les quatre axes. S'y ajoutent deux vastes ailes en forme de salles à trois nefs, coifées de coupoles, portées par des piliers sur un plan octogonal. Le tambour extérieur exceptionnellement massif qui surmonte la coupole de la maqsura est resté dépourvu de dôme pendant 300 ans ; celui-ci a été construit il y a quelques années seulement. L’influence de Boukhara est sensible dans la clôture polygo¬nale de la niche du portail et dans les tours basses qui occupent les angles de la façade principale. Le décor habituel de la façade est constitué, comme dans la madrasa Chir-Dor, de briques émaillées, de panneaux de céramique et de mosaïque de faïence, mais sa qualité est nettement inférieure à celle de la madrasa Chir-Dor. Le Registan de Samarcande, dont les bâtiments tendent à s’effacer devant les majestueuses proportions d’ensemble, offre un rare exemple de complexe architectural achevé et cohérent. Comme une gigantesque scène ouverte sur le sud, cette place répond spirituellement, sinon formellement, à l’idée du forum antique.

Le XVII siècle a également laissé au sud-ouest de Samarcande un ensemble architectural, érigé près du tombeau du célèbre chaykh soufi Khoja Ahrar. On peut encore y observer une madrasa avec mosquée, dont 1’axe principal est rigoureusement orienté vers La Mecque, une mosquée d ‘été de type loggia avec un mihrab à mosaïques et quelques bâtiments plus tardifs. La madrasa, dont la construction est attribuée au ministre Nadir Diwan Begi, celui-là même qui a édifié la madrasa de Boukhara et la khanqah qui porte son nom, se caractérise par une certaine simplification du plan. Les salles a coupole traditionnelles de part et d’ autre du portail d'entrée sont absentes. L'axe transversal de la cour est souligné par des portails. La mosquée d’été se trouve sur la face ouest de la cour asymétrique, ornée d’un bassin polygonal, alors que la mosquée d'hiver ferme l axe longitudinal de la madrasa. Cette dernière mosquée est formée d’une salle à coupole sur croisée, flanquée de chambres latérales. Leurs niches formant portail s’ouvrent sur la cour, comme celle de la salle. Le bâtiment était très délabré, mais il a fait l’objet d’ importants travaux de restauration, qui ont également touché le revêtement ornemental continu de sa façade cour. Bien des éléments sem¬blent indiquer que cette mosquée est plus ancienne que la madrasa, mais l’ornementation des deux corps de bâtiments et les couleurs vives, dominées le jaune et le vert, remontent indéniablement au XVII siècle. On peut également dater de cette époque la mosquée d'été» une loggia à colonnes avec un mihrab à mosaïques au centre du mur postérieur. Une ancienne nécropole à stèles de marbre, dotées d'ornementations et de décors calligraphiques remarquables, jouxte la cour extérieure.

Mosquee Bibi Khanum (1405)

Mosquee Bibi Khanum (1405)

A son retour de la campagne de l`Inde, Tamerlan fit construire au nord de Samarkand, près de la “Porte de Fer” qui s`ouvrait sur les route de la Russie et de la Mongolie, une mosquée cathédrale.

Quelques années après la mort du Conquérant, une legende naquit et se propagea parmi le peuple qui attribuait l`initiative et le mécénat de ce gigantesque ouvrage à Saray Mulk Khanum, son épouse préférée, non sans y ajouter de nombreux épisodes romanesques. C`est ainsi que peu à peu on appela la mosquée cathédrale “mosquée Bibi Khanum”.

En réalité, Tamerlan ordonna, et participa même, à la réalisation de ce majestueux monument religieux, comme en témoigne Clavio, qui le vit se faire porter le matin en litière sur le chantier où il encourageait les ouvriers en leur lançant des pièces d`argent et de la nourriture. Au retour d`une expedition, il aurait fait abattre une partie du bâtiment, pour la faire reconstruire en plus grand, l`ayant jugée disproportionnée.

On lit dans la chronique que Tamerlan avait été impressionné par la mosquée de Delhi et qu`il avait déclaré qu`il ferait encore mieux à Samarkand.

En effet, la mosquée cathédrale fut le monument le plus vaste de cette époque; a sa réalisation oeuvrèrent des architectes, des ingénieurs, des tailleurs de pierre, des ébénistes, des ceramists et des peintres venus des quatre coins de l`Empire. Sur une miniature timouride, on voit les éléphants ramenés de Delhi participer au travail des hommes en leur apportant de lourds madriers, tandis que s`affairent les maçons.

Malheureusement, le gigantisme de l`ouvrage construit en briques, l`intensité et la fréquence des tremblements de terre, habituels à cette region du globe, le vandalisme de certains habitants de Samarkand qui n`hésitèrent pas, après la disparition du Grand Emir, à en arracher des parties importantes pour en construire des maisons, et même des écuries, ont été les causes de la transformation de la mosquée cathédrale en cette immense amas de ruines actuel.

De nos jours, il subsist encore la moitié du portail extérieur, avec ses piliers et ses tours rondes de soutien décapités, le corps principal de la mosquée et son portail monumental partiellement détruits, le grand dôme bleu effondré aux deux tiers et, dans la cour, deux petites mosquées délabrées; plus loin, un gros minaret tronqué.

Au centre du jardin, anciennement la cour, on peut admirer un énorme lutrin en marbre ciselé, dû à la générosité d`Oulough Beg.

La petite histoire dit qu`on plaçait sur ce lutrin, pour la lecture publique, le grand Coran d`Osman pris à Bajazet, constitué de peaux entières de gazelles.

Les travaux débutèrent le 11 mai 1399 a l`heure favorable fixée par un horoscope. Ils allèrent bon train, car une année après le bâtiment principal était terminé.

A la mort de Tamerlan (1405) le chantier fut fermé définitivement. A ce moment – là, il existait les portails monumentaux, la mosquée avec son dôme, les petites mosquées latérals, le minaret et la cour entourée des arcades et des galeries. L`ensemble ne fut jamais achevé, cependant la mosquée cathédrale servit plusieurs fois pour célébrer la prière du vendredi au nom de Tamerlan.

Au XVe siècle, on penetrait dans la cour de la mosquée par un immense portail don’t l`ogive ouverte parcourait vingt mètres. Dans l`espace sans aucun soutien, véritable tour de force si l`on songe que l`ouvrage était en briques; ses extrémités prenaient appui sur des piliers massifs, eux-mêmes étayés par des tours rondes. Une magnifique torsade en céramique, décorée de motifs floraux et géométriques, encadrait les côtés internes du portail. Les larges battants de la porte en bronze doré étincelaient au soleil.

En face, occupant le fond de la cour, se dresse la mosquée. On y entrait par un portail haut de trente mètres don’t les piliers étaient soutenus par des tours octogonales s`amincissant vers le haut, forme de construction peu habituelle en Asia central. Le corps du bâtiment est carré avec des hautes niches sur les axes. La coupole qui la surmontait avait été elle – même coiffée d`un dôme ogival monté sur un tambour, sans doute parce que l`édifice avait été jugé trop bas par Tamerlan. Ainsi, la mosquée depassait sensiblement cent mètres de hauteur.

Dans l`axe transversal de la cour, à droite et à gauche, il y a deux mosquées plus petites, mais de conseption analogue : portail à entrée de forme ogivale, dome surplombant une première coupole et briques émaillées composant des invocations à Allah.

Au centre, le pavillon aux ablutions sera bientôt remplacé par le lutrin offert par Oulough Beg.

La décoration de la mosquée cathédrale est aussi riche qu`extraordinairement nuancée, comme on peut le constater en examinant ce qui subsiste encore des bâtiments.

Dans le bas, des plaques de marbre ciselées formaient les plinthes, au-dessus s`épanouissaient les panneaux de briques émaillées de plusieurs couleurs, de mosaïques brillantes et des pièces de céramiques représentant des fleurs stylisées.

Le grand dôme avait une couverture de briques émaillées bleu turquoise, dont l`analyse chimique a révélé l`exellente composition de l`émail. Les pièces émaillées et les majoliques formaient des dessins géométriques et floraux, au milieu d`étoiles et d`inscriptions en caractères arabes, d`une variété infinie dans les formes et les couleurs. Sur les tambours des trois mosquées brillaient en caractères bleus de deux mètres de haut des citations du Coran.

Rien que pour la décoration extérieure du bâtiment principal, on peut estimer à plus de deux mille mètres carrés la surface recouverte par les briques émaillées et les majoliques, et le nombre de celles-ci à deux millions au moins. Travail prodigieux si l`on pense que cela fut fait en moins de quatre années et que chaque pièce de recouvrement était l`objet d` une cuisson et d`un émaillage de haute qualité. L`intérieur de la mosquée comportait en outre des peintures avec des dorures et des ornements en papier mâché doré.

Les fondations des constructions sont profondes et massives. Les murs sont formés par de nombreuses épaisseurs de briques cuites unies entre elles par un mortier de gypse ; le dernier rang est constitué de briques émaillées de plusieurs couleurs formant partie de décor.

Il semble que les techniques et les matériaux utilisés par les architectes n`aient pas été à la mesure des trop vastes dimensions de la mosquée, car Ibn Arabchah nous raconte que, déjà au cours des premières années des briques tombaient sur la tête des fidèles priant sous la coupole.

Cependant, il est hors de doute que les plus importants dégâts ont été causés par les trenblements de terre, responsables du renversement des colonnes des marbre, de l`ébranlement des portails et de l`éventration des coupoles et du dôme. En 1897, une secousse sismique fit tomber le mur interne du portail d`entrée et l`arc supérieur de son ogive.

Les bâtiments démesurés de la mosquée cathédrale se sont écroulés, comme le rêve impérial de domination du monde de Tamerlan, mais les nombreux pans de murs qui en subsistent dégagent, grâce à leurs ornements d`émaux et de céramique multicolores et brillants, une impression de beauté et de joie, peu habituelle à l`état de ruines.

Caractéristiques de l'architecture timouride

L'évolution et les caractéristiques de l’architecture d'Asie centrale, du milieu du XIV* siècle jusqu’au milieu du siècle suivant, portent l’empreinte de l’empire créé au cours de ses expéditions, par Timur, conquérant aussi talentueux qu’impi¬toyable. Cet immense empire s’étendait de l’Asie Mineure à l’Inde. La ville de Delhi y compris -, du Caucase et des steppes kazakhes jusqu’à la mer d’Arabie. Timur avait choisi pour capitale de ce territoire infini Samarcande, dans l’actuel Ouzbékistan, une ville à laquelle il prêta éclat et splendeur en y faisant construi¬re des édifices aussi monumentaux que fastueux. Les nombreux bâtiments de cette époque témoignent de la passion de Timur pour l’architecture et de sa volonté de souligner son pouvoir immense par une expression architecturale appropriée. Des architectes et des artistes originaires des contrées conquises, d’Asie Mineure, d’Azerbaïdjan, du Caucase, d’Inde, d’Iran et de bien d’autres régions encore, furent enrôlés de force et participèrent ainsi à la construction de bâtiments « publics », sacrés ou profanes, de dimensions souvent considérables. Des écoles et des traditions artistiques extrêmement diverses se fondirent ainsi dans le creu¬set de la volonté de monumentalité.

La priorité allait désormais à l’aspect extérieur des bâtiments monumentaux, lequel devait être imposant. Les édifices majestueux étaient couronnés de coupoles, les puissants portails prirent une forme architecturale autonome et devinrent des symboles de prestige ; dans le même temps, les proportions s’affinèrent. On sur¬monta les coupoles internes qui remplissaient une fonction structurelle de hauts tam¬bours coiffés de dômes, stabilisés par des nervures de brique saillantes et par des raccords de bois. Ces constructions purement externes, sans lien avec l’espace inté¬rieur, jouaient un rôle exclusivement décoratif. Cette idée architecturale remontait au XI siècle mais elle ne se répandit vraiment qu’aux XIV et XVe siècles, donnant aux édifices monumentaux leur aspect caractéristique.

Le XVe siècle innova en faisant reposer la coupole sur deux paires d’arcades de briques qui se recoupaient, renonçant ainsi à l’octogone en trompes traditionnel. Deux arcs de brique s’élançaient à égale distance des murs au-dessus de l’espace carré, deux autres arcs s’y ajoutant transversalement. Se recoupant au sommet, Us formaient une base de coupole carrée. Ce type de coupole était nettement plus petit que celles qui reposaient sur des trompes d’angle, dont la portée correspondait à la longueur des côtés de la salle. Les espaces situés entre les points culminants des arcs étaient fermés par des écoinçons en forme d’écu — des remplissages concaves, en losanges, disposés entre les intersections des arcs ; on aménagea éga¬lement des écoinçons du même genre entre les trompes du sous-oeuvre traditionnel et octogonal des coupoles.

Cette méthode de construction, qui se prêtait fort bien aux conditions sis¬mologiques de l’Asie centrale, modifia radicalement le caractère de l’espace inté¬rieur. Auparavant, celui-ci avait dû son apparence statique à la succession verticale d’une salle carrée et d’un octogone à trompes ; dynamique. Cette technique avait vu le jour en Asie centrale, sans doute en Arménie, où elle était connue depuis le XII siècle, au XIVe siècle, on commença à l'employer également dans l'architecture de l église russes, ce qu'il faut proba¬blement imputer à l'activité d'architecte des arméniens qui quittèrent leuer pays conquis par Timur pour les réfugier en Russie, auprès de leurs coreligionnaires.

Mais un des traits les plus frappants de l'architecture de l'Empire timuride est sans nul doute le revêtement multicolore et éclatant de mosaïques de faïence, qui recouvrait la maçonnerie de briques comme une écorce étincelante. L'architecture des XIe et XIIe siècles avait fait un choix diamétralement opposé , elle avait en effet attribué une grande valeur esthétique à la maçonnerie de brique et à la construction elle-même, qui 'était attachée à mettre en valeur l’ocre naturel de la brique et de la terre cuite, et à préserver, jusque dans le décor, la clarté de la structure architecturale, les bâtiments construits sous Timur furent au contraire enveloppés de revêtements qui dissimulaient leur armature architecturale. L'intérieur des édifices impériaux des XIVe et XVe siècles est dominé par des peintures murales ornementales ; les coupoles intérieures sont tapissées d'ornemets en relief de papier mâché doré, et l’on rencontre fréquemment des lambris réalisés en panneaux émaillês, aux motifs subtils. Les décors en stalactites, les fameux « muqarnas », qui recouvrent comme un camouflage les voûtes de brique et les coupoles, étaient extrêmement répandus.

Le désir de monumentalité se traduisit par la construction de bâtiments aux dimemioni jamais égalées, Même dans l’architecture funéraire de l’époque, on observe, parallèlement aux petits mausolées de type traditionnel, c'est-à-dire des édifices à coupole sur un plan carré, des sépultures aux dimensions généreuses et aux décors somptueux, qui n’ont rien à envier à des palais. Leur salle centrale {gur- khans) était entourée de locaux aux formes et aux fonctions variées. Le caractè¬re officiel de cette architecture, conçue pour glorifier l’empire, s’exprima feulement dans la construction de vastes complexes de bâtiments sacrés, funéraires et profanes.

L'architecture sous Timur

Dans sa ville natale de Char-i Sabz, Timur fit construire le palais de l’Aq-Saray (le « palais blanc », c’cat-à-dire « beau »), dont il ne reste aujourd'hui que les ruines de l'immense portail d’entrée, richement orné. Sa hauteur s’élevait à une cin¬quantaine de mètres et son ouverture cintrée atteignait 22 mètres. Il était flanqué d’imposants piliers d’angles à soubassement polygonal et à partie supérieure cylin¬drique. Une vaste cour avec un bassin s’étendait derrière le portail. Elle était entourée de bâtiments à deux étages abritant de nombreuses salles et pièces d’ha¬bitation. L’inscription qui figure sur le portai! « Si tu doutes de notre pouvoir, regarde nos bâtiments ! » annonçait ostensiblement la fonction politique de l’ar¬chitecture timuride.

On retrouve le même principe dans le puissant complexe funéraire et cultuel construit de 1389 à 1399 dans la ville de Yasi, l’actuelle Turkestan au Kazakhstan, sur la tombe de Khoja Ahmad Yassawi, un saint local. La disposition complexe du bâtiment, dont les locaux se trouvent en quelque sorte emboîtés dans un « étui rectangulaire, révèle une planification rationnelle et efficace. Il convient de remar¬quer que l’immense coupole, abondamment décorée de stalactites, ne repose ni sur des écoinçons ni sur des trompes, mais exclusivement sur la construction, déjà décrite précédemment, de poutres de bois disposées en diagonale au-dessus des angles de la salle.

Les mosquées de Samarcande et de Boukhara

Entre 1399 et 1404, après son expédition en Inde, Timur fit construire à Samarcande l'une des plus grandes mosquées du monde, la mosquée du vendredi, connue sous le nom de Bibi-Khanum. Ce bâtiment immense (140 m x 99,2 m) s ouvrait par un haut portail aux tours d'angles rondes, dont l'arc avait une portée atteignant presque 19 mètres. Derrière le portail s'étendait une vaste cour, encadrée de galeries à coupoles reposant sur des colonnes de marbre. Le batiment principal de la mosquée, couronné d une coupole culminait 44 metre au fond de la cour. Son gigantesque portail était flanqué de tours assises polugonale entierement recouvertes, de bas en haut et sur tous les cotes d’un decor, de panneaux de mosaïque. Deux salles à coupole de dimensions plus modestes s’elevait dans l’axe transversal de la cour ; les quatre coins extérieurs étaient occupés minarets graciles. Un revêtement émaillé polychrome tapissait les facades tandis que les portails étaient ornés de mosaïques et de marbre sculpté d’une complexite et d'une richesse peu communes. L'intérieur était entièrement recouvert peinture ornementale or et bleue.

Des maîtres d’oeuvre originaires pays conquis par Timur, dont l’Azerbaïdjan, participèrent à la construction de cette mosquée. Il ne reste aujourd'hui que des ruines de Bibi'Khanun, qui avait commencé à se dégrader avant même la fin de la construction. La pression de gigantesques masses de brique était trop forte, et la coupole, trop haute et supportait aussi mal que les arcades reposant sur de minces fûts de marbres, les secousses dues aux fréquents tremblements de terre. Par ailleurs, les anciennes techniques de construction ne se prêtaient guère à un édifice aux dimensions aussi prodigieuses et les conditions naturelles locales n'étaient pas familières au batisseurs étrangers. Les travaux de restauration, entrepris a l'époque sovietique, durent depuis presque trente ans. Les ruines authentiques et mafestuese de ce puissant bâtiment ont malheureusement été emmurées dans une sorte de trompe l’oeil de briques et de béton, qui n'a fait qu'achever en quelque sorte l’oevre de destruction du temps.

La mosquée « Kalan » de Boukhara, la mosquée du vendredi, a été construite dans la première moitié du XVe siècle, peut-être sur les vestiges d'une ancienne mosquée du XII e siècle, dont on a conservé le minaret. Mais elle s’inspire indéniablement du modèle de l'immense mosquée de Samarcande. Ici pourtant, l’axe transversal n'est pas occupé par de petits bâtiments à coupole, mais par des portails relati¬vement bas, à fonction purement décorative. Les 288 coupoles de la galerie qui entoure la cour ne reposent pas, comme à Samarcande, sur des colonnes élancées et fragiles, mais sur de puissants piliers. Pour la première fois sans doute, la niche habituelle du portail d'entrée adopte un plan polygonal - un procédé qui s’est répandu dans l’architecture de Boukhara aux xvr et xvir siècles. Le bâtiment principal (maqsura) s'ouvre sur la cour intérieure par une haute et large niche for¬mant portail. Dans la salle carrée, un très profond mihrab orné d'une mer¬veilleuse mosaïque de faïence attire les regards. Cette salle est couronnée d’une coupole, elle-même surmontée sur l’extérieur d’un dôme de couleur turquoise, posé sur un tambour rond, h revêtement ornemental. Avec le minaret, cette cou¬pole extérieure constitue le deuxième point de repère de Boukhara. Les galeries de la cour, relativement plates et qui semblent étirées en longueur, contrastent de manière impressionnante avec la maqsura monumentale et avec les proportions de son portail d'entrée qui est situé directement en face de celui de la madrasa Mir-i Arab.

Les mausolées

À 200 mètres au sud-est de l’entrée de la mosquée de Bibi-Khanum à Samarcande, on aperçoit les ruines du mausolée du même nom. 11 faisait sans doute partie inté¬grante de la madrasa de Bibi-Khanum depuis longtemps disparue, située en miroir (ce qu'on appelle le système de kosh) avec la puissante mosquée. La crypte, consti¬tuée d’un carré central dont la coupole est en ruine et de quatre niches profondes, basses et voûtées, se trouve sous le sol. Un octogone de construction primitive assure la transition entre la salle carrée de l’étage supérieur et le tambour. Il ne repose pas sur des trompes et des écoinçons, mais sur des poutres encastrées en diagonale dans la maçonnerie, qui ont été recouvertes, comme de coutume, de sta¬lactites de stuc {gai). Celles-ci remplissent également les moitiés supérieures des étroites niches internes. Le tambour est orné d’une inscription en grands carac¬tères coufiques faite de briques émaillées ; il est couronné des vestiges d’une coupole. Abstraction faite de la crypte somptueusement décorée, le bâtiment et ses détails tranchent sur l’architecture funéraire surchargée de l’époque par le rare équi¬libre de leurs proportions et par la discrétion du décor. Au-dessus du socle de pierre, le revêtement mural de la crypte est composé de petites briques polies, entre¬coupées de panneaux bleus et bleu pâle. Un lambris de mosaïques à ornements « gereh » (des motifs géométriques en forme d’étoiles) entoure le registre inférieur des murs de la salle supérieure, les dessins géométriques en étoiles des murs de la salle carrée se distinguant de ceux des niches. Le lambris est divisé en plusieurs pan¬neaux entrelacés d’or, tous encadrés d’une bordure de mosaïque. Sur la partie du mur située au-dessus du lambris, on distingue encore quelques traces de peintures murales bleues sur fond blanc avec des touches de vert, de jaune, de brun et d’autres teintes. Les paysages stylisés, librement appliqués, sont particulièrement remarquables.

Des motifs décoratifs analogues, dont un lambris de mosaïque à « gereh », ornent l’intérieur du mausolée de Tuman-aka (1405), dans la nécropole de Chah- i Zinda à Samarcande. Il semblerait que les deux bâtiments aient été construits et décorés par les mêmes maîtres.

Mausolée Gour-i-Emir

Mausolée Gour-i-Emir

À la fin du XIVe siècle, on édifia à Samarcande un complexe architectural formé d’une madrasa et d’une khanqah où pouvaient loger les pèlerins. Les deux bâtiments se font face de part et d’autre d’une cour carrée fermée, les deux entrées de portails étant ainsi dirigées l’une vers l’autre. En 1404, à la mort de Mohammad Sultan, le petit-fils préféré de Timur, on construisit en vis-à-vis de l’entrée de la cour, un mausolée en son honneur, connu sous le nom de Gur-i Mir (tom¬beau de l’émir). Il servit ensuite de sépulture à Timur et à ses successeurs. Son architecture est tout à fait inhabituelle : un tambour cylindrique, haut et massif, couronné d’une coupole à godrons en ogive se dresse sur un socle octogonal. Le cylindre, doté d’un revêtement ornemental et coiffé de la grande coupole bleu ciel, domine le bâtiment et lui prête l’aspect d’une tour. Ce monument marque aujour¬d’hui encore le visage de la vieille ville. La salle carrée du mausolée, aux profondes niches marquant les quatre axes, est ornée d’un lambris d’onyx précieux et de pein¬tures ornementales, tandis qu’un décor raffiné, bleu et or, de papier mâché tapis¬se la coupole intérieure. Une crypte au plan cruciforme, recouverte d’une coupole très aplatie, se cache sous le sol. À proximité du Gur-i Mir, se trouvent les vestiges d’un mausolée du nouveau type en forme de palais, que l’on appelle Aq-Saray. Il s’agit d’un bâtiment de dimensions relativement modestes datant du milieu du XVe siècle, dont on a conservé la salle centrale à coupole, les pièces d’angles et une longue salle en galerie à trois parties, du côté nord.

Il est presque impossible aujourd’hui de se faire une idée de l’aspect exté¬rieur que présentait ce bâtiment. Mais le raffinement que trahissent les vestiges de l’architecture intérieure est à vous couper le souffle. Des mosaïques de faïen¬ce d’une finesse extrême et des peintures en relief « kundal » bleu et or rehaus¬sent encore l’élégance de la voûte qui repose sur des doubleaux en intersection. La petite coupole de la salle centrale repose sur des paires d’arcs qui se recou¬pent, et dont les espaces intermédiaires sont remplis d’un réseau de fines nervures.

Le mausolée d’Ichrat-Khana

Un peu plus ancien, est plus grand que l’Aq-Saray. Comme ce dernier, il a pu, par bonheur, échapper à une restauration intégrale. Ici encore, la grande salle centrale aux profondes niches axiales est recouverte d’une coupole peu élevée reposant sur des doubleaux qui s’entrecoupent. Sur deux niveaux par endroits, elle est entourée d’une multitude de salles au façonnement remarquable, présentant des formes et des fonctions diverses, ornées de lambris de mosaïque et de peinture « kundal ». Le grand bâtiment (28 m x 23 m) est assez bien conservé. Alors que le grand portail, magnifiquement décoré, est encore debout, il ne reste malheureusement rien du tambour extérieur à coupole — une caractéristique de l’architecture timuride —, qui s’élevait au-dessus de la coupole intérieure de la salle médiane. Le plan de l’Ichrat-Khana, d’une complexité rare pour un mausolée, a conduit à se demander s’il s’agissait vraiement d’un batiment funéraire, et non d'un palais situé à l‘ extérieur de la ville, ce que pourrait encore confirmer son nom — lchrat-Khana signifie en effet « maison de la joie ». Mais la crypte octogonale à coupole aplatie, que l’on rejoint par le passage caracteristique, ne laisse aucun doute sur la fonction de cet étonnant bâtiment. Quand aux palais construits par Timur et ses descendants, nous n’ en possédons plus, hormis le portail du palais de Char-i Sabz et quelques vestiges archéologiques et que les descriptions de contemporains admiratifs.

La Nécropole Chah-i Zinda

La Nécropole Chah-i Zinda

À côté des mausolées-palais, Timur et ses descendants ont également font construire des mausolées fidèles au type traditionnel. Ces constructions relativement petites, étaient destinées aux membres de la famille du souverain et à ses dignitaires. Samarcande en offre encore un exemple impressionnant avec la nécropole de Chah-i Zinda (« le roi vivant « ). Cette nécropole a été édifié sur le tombeau présumé de Muhammad Qutham ibn Abbas . A en croire la légende, ce cousin du prophète Muhammad aurait combattu les infidels en ce lieu et aurait disparu dans une faille rocheuse, où il se trouverait encore aujourd’hui. Les mausolées de Chah-i Zinda ont été construits le long d’un étroit chemin qui se dirige en pente raide vers le nord en suivant l’ancienne enceinte de la ville. Ce sont pour l’essentiel des bâtiments d’une seule pièce, dotés du portail obligatoire occupant la façade principale, et d’une coupole, sur laquelle s ‘eleve fréquemment — même sur les mausolées les plus anciens, de construction encore traditionnelle — une coupole extérieure décorative reposant sur un tambour. Plus les mausolées sont tardifs, plus cette structure décorative est haute et élancée.

Le décor des portails des mausolées de Chah-i Zinda séduit par sa magnificence et sa diversité, qui doivent beaucoup à des techniques raffinées certainenement très onéreuses. Des panneaux de faïence peinte, des céramiques emaillées et sculptées, de fines mosaïques de faïence et des appareils ornementaux de briques emaillees s’associent a des incriptions arabe et persanes d’une calligraphies superbes, qui, outre le Coran, citent frequemment des vers elegiaques et qui sont integrées ici dans des dessins floraux et géometriques. Chaque mausolée présente un décor de materiaux précieux tout à fait individuel, évitant toute répétition.

Alors que les façades d’entrée des mausolées représentent en quelque sorte le « dernier cri » du décor impérial, on a conservé sur les côtés qui n’étaient pas tournés vers le spectateur la maçonnerie de briques à détails plastiques modestes typiques de rarchitecture prémongole (XI-XII siècles). Cela prouve que le « style ancien » n’était pas définitivement oublié, mais qu’on préférait le dissimuler. Le faste de l’aménagement intérieur des mausolées de Chah-i Zinda ne répond guère à l’idée que l’on se fait en Europe d’un monument funéraire. Ainsi, les murs du mausolée de la sœur de Timur, Chirin-biki-aka (1385), sont ornés de peintures murales ornementales et d’un lambris de carreaux de céramique, sur la glaçure desquels on a ajouté un fin dessin d’or. Des paysages stylisés sur lesquels on distingue des pies au rendu très réaliste décorent un panneau mural. Les fenêtres situées sous la coupole sont fermées par des croisillons de stuc remarquablement travaillés, dans lesquels on a intégré des morceaux de verre rouge, bleu, orange et vert, créant un effet de vitraux. Un mausolée de deux pièces, construit dans les années 1430, est particulièrement impressionnant. On a longtemps cru qu’il s’agissait du tombeau de l’astronome Qadi Zada Rumi avant d’y découvrir les squelettes de deux femmes. Ses deux salles sont couronnées de coupoles hautes et élancées, en forme de tours ; des structures de stalactites complexes recouvrent Ici coupoles intérieures. Généralement, une pièce abritait le mausolée, et une autre la mosquée. Mais ici, la plus grande des deux pièces à quatre entrées disposées selon les quatre axes ne possédait pas le mihrab obligatoire. On suppose donc quelle servait de petite khanqah.

Un mausolée appelé l« octogone » révèle que des maîtres-d’oeuvre étrangers participèrent aux travaux de construction de Chah-i Zinda. Il s’agit en fait d’un pavillon ouvert sur tous les côtés, couvert d’une coupole reposant sur huit piliers reliés par de larges arcs. Les mausolées de forme polygonale, tout à fait insolite au cœur de l’ Asie centrale, étaient caractéristiques d’Azerbaïdjan ainsi que du Khorassan iranien. Le décor de l« octogone » - la mosaïque de céramique et la peinture de l'intérieur de la coupole — correspond en revanche aux traditions locales.

L'architecture sous les héritiers de Timur

L’architecture impériale de Timur présentait un caractère officiel plus ou moins marqué, que l’on retrouve du reste dans les constructions des États totalitaires de toutes les époques, quel que soit leur style. Elle se caractérisait par des dimensions gigantesques et par la somptuosité démesurée d’un décor qui n’était pas intégré à la construction mais simplement appliqué sur elle. Ces bâtiments ont dû leur existence aux desseins personnels de leur commanditaire et aux moyens illimités dont il disposait grâce au butin rapporté de ses expéditions. Il est vrai que, comme le montre clairement l’exemple de la mosquée de Bibi- Khanum, l’accroissement constant des dimensions s’accompagna de compli¬cations techniques. Les architectes et les artistes qui participèrent à ces travaux étaient originaires de pays différents, dotés de traditions distinctes, ce qui explique l’émergence d’un style international tout à fait singulier, proche dans son esprit, sinon dans sa forme, du baroque qui allait voir le jour plus tard en Europe.

S’ils remportèrent moins de victoires et amassèrent moins de butins, les héritiers de Timur, qui régnèrent à Hérat et à Samarcande, avaient apparemment meilleur goût. L’architecture monumentale de la première moitié du XV* siècle impressionne généralement moins par la puissance de ses dimensions que par l’ équilibre de ses proportions et par le raffinement de ses décors, aussi bien extérieurs qu’intérieurs. Le revêtement qui orne la façade est constitué essentiellement de mosaïque de faïence (avec parfois des incrustations de marbre sculpté), les dorures n ‘apparaissent plus sur les peintures murales et l’ornementation gagne en l’élégance.

Les madrasas d'Ulugh Beg

Les madrasas d'Ulugh Beg

Les trois madrasas les plus anciennes d’Asie centrale à avoir résisté aux outrages du temps datent du début du Xve siècle. Elles ont été construites sous Ulugh Beg, le petit-fils de Timur. Une madrasa antérieure, édifiée du vivant même de Timur, fai¬sait partie du complexe du mausolée de Gur-i Mir. Une khanqah et une petite madrasa se faisaient face de part et d’autre de la cour. Mais les vestiges de cette madrasa sont trop peu nombreux pour que l’on puisse se faire une idée de son aspect originel. En revanche, le bon état de conservation des trois madrasas d’Ulugh Beg, nous en donne une bonne image - malgré quelques dégradations et en dépit de nombreux travaux de restauration, plus ou moins judicieux et souvent injustifiables, réalisés à différentes époques.

Le type de la madrassa d’Asie centrale s'est imposé au début du XV” siècle. Les madrasas étaient des écoles de théologie, où l'on enseignait également des sciences profanes, dont les mathematiques et l’astronomie, une discipline dans la quelle Ulugh Beg excellait. Qu’il s’agisse de Boukhara (1418) ou de Samarcande (1417-1420) ou de Gijduvan (1437), les trois madrassas d’Ulug Beg suivent à quelques nuances près, le même schéma. La madrasa de Boukhara se distingue par sa façade prin¬cipal e. De part et d’autre du haut portail étroit à niche d’entrée ogivale, s'éten¬dent des portiques à ogives disposés sur deux étages, une idée architecturale quise généralisa aux XVIe et XVir siècles. Sur la porte sculptée, on pouvait lire il y a encore peu de temps une inscription dont la légende était un décret d’Ulugh Beg : « Aspirer au savoir est le devoir de tout musulman et de toute musulmane.»

On notera l’absence d’iwans transversaux dans la cour, une particularité qu’il faut peut- être attribuer à une transformation du XVIe siècle, ce que semble confirmer le revê¬tement des façades latérales de la cour dans le style d’Abdallah Khan, caractéristique de cette époque.

La plus grande madrasa d’Ulugh Beg, celle de Samarcande, s’ouvre par un immense portail sur la grande place de la ville, le Registan. Ses dimensions n’ont pas grand-chose à envier aux bâtiments de Timur, mais elle est moins massive que la plupart d’entre eux. Bien que l’étage supérieur des cellules qui entourent la cour avec les loggias en arcades où se trouvaient les entrées ait disparu et que la partie supérieure du portail soit manquante, le bâtiment laisse une impression inoubliable par sa silhouette imposante et son admirable décor. Le plan de cette madrasa se distingue par quelques particularités. Elle possède ainsi aux quatre angles — et non pas seulement à gauche et à droite du portail d’entrée — des salles d’étude à cou¬pole, avec quatre niches en symétrie axiale, tandis qu’une mosquée surprenante occupe l’espace situé entre les salles postérieures. Elle est formée d’une salle rec¬tangulaire, articulée par quatre arcs transversaux, une coupole coiffant chacune de ses cinq parties. À côté de l’entrée principale, on trouve deux autres pièces dans les iwans transversaux qui servaient également de salles de cours (darskhana). Ces particularités n’empêchèrent pas la madrasa d’Ulugh Beg de Samarcande de servir de prototype à de nombreuses madrasas à venir.

La madrasa d’Ulugh Beg située à Gijduvan est la plus petite des trois. A étage unique, elle ne compte que quatre cellules de chaque coté de sa cour. La façade symétrique comme le veut la tradition, possede un riche décor de faiences. De part et d’autre du haut portail , chacune des ailes presente une paire d’étroites portes cintrées, donnant accès aux salles situées à l'arrière. Se distingant du plan carré habituel des salles qui flanquent le portail, la salle de la mosquee et la salle d’études sont rectangulaires. Comme la mosquée de la madrasa de Samarcande elles sont couvertes de voûtes reposant sur des arcs transversaux, L’unique ïwan situé sur le dos de la construction, se détache de la façade postérieure de la madrassa par des angles en biseau, que l’on retrouve du reste sur l’ïwan postérieur de la madrasa d’Ulugh Beg à Boukhara.

L’observatoire d’Ulugh Beg

L’observatoire d’Ulugh Beg

Dès le début du XXe siècle, on a decouvert à Samarcande les vestiges d’un bâtiment qui par sa fonction bien particulière, constitue un exemple unique dans l’architecture des XIVe – XVe siècles. Les éléments de fondations dégagés au nord de Samarcande sont ceux d'un observatoire, construit en 1428-1429 sur l'ordre d’Ulugh Beg. Même s’il ne fut pas un aussi grand stratège militaire que son grand-père, Ulugh Beg fut en revanche un érudit célèbre, qui a réalisé des tables astronomiques utilisées jusqu'aux temps modernes et qui a largement contribué à la diffusion de la science profane. Peu après sa mort violente, l'observatoire abandonné fut rasé.

L’instrument le plus important de cette installation, le sextant qui servait à mesurer la distance des corps célestes, se trouvait sur l'axe nord-sud de ce bâtiment circulaire, d'un diamètre de 48 mètres. Un segment de pierre polie en quart de cercle, portant une graduation en encoches et des signes astraux, est profondément enfoncé dans le substrat de pierre. A côté du sextant, se trouvaient des locaux de diverses formes et parfois bizarres en raison du plan circulaire du bâtiment. Sans doute s'en servait-on pour ranger des instruments de plus petites dimensions ; il pouvait aussi s’agir de salles de travail destinées aux savants. L'aspect extérieur de l’observatoire ainsi que son aménagement intérieur ont donné lieu à plusieurs hypothèses. La version la plus récente, et sans doute la plus convaincante, plaide en faveur d’un immense cylindre sur trois niveaux. Ses deux étages supérieurs se présentaient sous forme de portiques, un ornement géométrique de grand format dans le style de l’époque décorait le rez-de-chaussée percé d’entrées et de fenêtres. Malheureusement, nous ne connaissons aucun bâtiment comparable de la même époque, mais uniquement les observatoires plus tardifs de Delhi et de Jaipur, probablement construits sur le modèle de celui de Samarcande.

L’architecture monumentale de la première moitié du XV* siècle marque un certain renoncement à la gigantomachie timuride et à l’omniprésence pesante d’un décor polychrome ne laissant aucune surface vide. Bâtiments et formes entretiennent un rapport plus harmonieux, leurs proportions sont plus équilibrées, et leur décor est plus élégant qu’opulent. On perfectionna alors les anciennes méthodes de construction de coupoles et l’on en inventa de nouvelles, tout en continuant à employer les techniques traditionnelles. De nombreux procédés de l’architecture timuride — touchant la technique, la composition et l’art — allaient donner lieu à des utilisations et à des améliorations nouvelles au cours de l’époque suivante, aux XVIe et XVIIe siècles.